Initialement publié sur Athens Indymedia le 26/10/2025.
« Et si certain-es ne sont jamais revenu-es, iels vivent parmi nous à chaque souffle de liberté. Et si certain-es sont tombé-es au combat, iels sont à nos côtés dans chacune de nos actions. Et si certain-es sont parti-es trop tôt, iels marchent devant nous en nous ouvrant la voie. » [extrait de l’appel de Marianna et Dimitra pour un mois d’octobre de mémoire et d’action]
Dans la nuit du 24 octobre 2025, nous avons incendié une voiture de police banalisée appartenant à la police berlinoise devant le commissariat de police Section 24 à Berlin. Les véhicules de police banalisés sont garés sur le terre-plein central du Kaiserdamm.
Seize personnes ont déjà été abattues par la police en Allemagne cette année. Et tandis que les familles et les amis tentent encore de comprendre cette réalité brutale, l’État et la presse rejettent la faute sur les victimes. Après l’exécution de Lorenz à Oldenburg dans la nuit du 20 avril 2025, abattu d’une balle dans la nuque, le torse, la hanche et la cuisse, des mensonges sur une prétendue attaque au couteau ont été diffusés. Tout comme cela a été fait dans les cas de Hussam Fadl, Lamin Touray, Mouhamed Lamine Dramé et d’innombrables autres. Si, grâce à la pression publique, des poursuites sont engagées, les auteurs en uniforme quittent le tribunal avec des non-lieux et des relaxes.
Pendant ce temps, les personnes noires et migrantes continuent d’être victimes quotidiennement de violences policières racistes, subissant des contrôles aléatoires, des prises douloureuses mettant leur vie en danger et des abus dégradants qui aboutissent trop souvent à la mort. Cela touche également les personnes sans domicile fixe, les personnes atteintes de maladies mentales et les personnes LGBTIQ*. Les pratiques policières racistes, criminelles et mortelles sont omniprésentes. La croyance inébranlable en Allemagne dans « l’humain derrière l’uniforme » semble faire l’unanimité dans de nombreux esprits, non pas malgré le passé nazi, mais plutôt à cause de lui. Cela transparaît clairement dans l’affirmation bien établie selon laquelle les policiers et les soldats d’extrême droite sont des « cas isolés », même si personne n’est en mesure de compter la multitude de groupes de discussion d’extrême droite, de réseaux soutenant le NSU et de groupes armés, du « Nordkreuz » au « Nordbund ». Elle est également évidente dans la large acceptation sociale de la violence policière massive, tant qu’elle touche celleux qui sont marginalisé-es parce que étranger-es, différentdifférent-ess ou malades.
Alors que les proches et les initiatives antiracistes doivent se battre pour obtenir un minimum de visibilité après les meurtres commis par la police, la violence raciste de l’État a été ouvertement et fièrement affichée au cours des deux dernières années lorsqu’il s’agissait de réprimer les manifestations de solidarité avec la Palestine. La persécution des organisations de migrant-es dans le cadre des pratiques policières allemandes n’est pas une nouveauté. Dans la criminalisation des Kurdes et des Turcs en vertu de l’article 129b, qui dure depuis des décennies, l’État allemand illustre sa poursuite d’intérêts géopolitiques. De bonnes relations avec la Turquie constituent, entre autres, une base importante pour les accords frontaliers et les exportations d’armes. Alors que les manifestations s’intensifiaient en réponse à la multiplication des meurtres en Palestine, la politique de l’État allemand coïncidait avec un appareil policier historiquement ancré dans la continuité de l’exploitation et de la violence coloniales, de l’histoire nazie et du militarisme.
Avec le soutien des politiques, la police a dispersé les manifestations où et quand elle le voulait, frappant les personnes qui scandaient des slogans en arabe, portaient des keffiehs ou réclamaient la liberté pour la Palestine. Le schéma n’a pas beaucoup changé depuis le début du colonialisme : les personnes qui ne sont pas reconnues par la police et la presse comme blanches et allemandes sont assimilées en un seul groupe, assignées à une région et dotées de caractéristiques « culturelles » stéréotypées. Un mouvement diversifié regroupant des dizaines de milliers de personnes a ainsi pu être publiquement soupçonné d’être une organisation de façade du Hamas, animée par l’antisémitisme. Le droit à la liberté de réunion n’existe actuellement plus pour le mouvement palestinien.
Dans les écoles berlinoises également, l’autorité interprétative de l’État doit être appliquée sous le prétexte de la prévention présumée de l’antisémitisme. Depuis le 7 octobre, l’administration du Sénat autorise les écoles à interdire le port de symboles palestiniens. Selon les organismes de lutte contre la discrimination, ce décret a conduit à une intimidation massive des élèves.
Mais alors que chaque slogan « De la rivière à la mer » est réinterprété comme un fantasme antisémite d’extermination, les attaques réelles contre des Juifves ou des synagogues n’intéressent les politiciens que dans la mesure où elles peuvent être utilisées pour discréditer les manifestations. Le fait que plusieurs milliers des plus de 6 700 affaires engagées par le parquet de Berlin contre le mouvement de solidarité aient été classées sans suite par les tribunaux pour manque de soupçons ou de pertinence ne dérange probablement pas les responsables. La police berlinoise a toujours préféré punir les manifestations elles-mêmes. Springer et compagnie s’occupent du reste avec leurs « reportages ».
Et avant que quelqu’un ait l’impression que cet État policier est suffisamment bien établi, terminons par un aperçu de la nouvelle loi policière berlinoise : l’ASOG. Le gouvernement régional noir-rouge est en train d’élaborer une nouvelle loi sur la police qui prévoit davantage de vidéosurveillance, des chevaux de Troie d’État et, surtout, un changement significatif dans les pouvoirs d’intervention de la police. À Berlin, des « lieux propices à la criminalité » (KbOs) ont été créés il y a des années, tels que le parc Görlitzer, la ligne de métro U8 et la rue Rigaer.
Avec la nouvelle loi ASOG, la vidéosurveillance va être ajoutée à ces lieux, er sera traitée à l’aide de l’IA. Cela sera également possible pour les événements publics. Le logiciel d’analyse « Gotham » de Palantir permettra à l’avenir aux autorités berlinoises d’exploiter les masses de données numériques. L’« IA de reconnaissance comportementale » de l’Institut Fraunhofer va désormais être utilisée à Berlin, après avoir été déployée à Hambourg et Mannheim. Il est prévu de former l’IA à l’aide d’images provenant de caméras de surveillance dans les KbOs, d’enregistrements d’objets menacés et de séquences filmées par la police à partir d’hélicoptères et de drones. Si la loi est adoptée, les policiers seront à l’avenir autorisés à installer secrètement des chevaux de Troie d’État dans les domiciles. Ce projet traite également de la volonté des policiers d’accéder aux messageries cryptées en leur permettant de les intercepter avant que les services de messagerie ne les cryptent.
Feu et flammes pour les flics !
Liberté pour Nanuk, Maja et toustes les antifascistes !
Liberté pour les accusé-es de l’affaire dAmpelokipi !
À la mémoire de notre compagnon Kyriakos Xymitiris – POUR TOUJOURS L’UN DES NOTRES